Céréales dans la nourriture pour chiens - sain ou pas ? — Blog — Inuvet

Le chien n'est pas un loup - du moins pas tout à fait

Il y a environ 10.000 à 15.000 ans, pendant la dernière grande période glaciaire, un nouveau partenariat très fructueux a vu le jour : celui entre l'homme et le loup. Il existe plusieurs théories sur l'origine exacte de cette cohabitation, qui présentait probablement des avantages pour les deux espèces. Les loups pouvaient se nourrir des restes de chasse des hommes et, accessoirement, surveiller les campements des hommes. Un campement à proximité duquel une meute de loups se tient et, en cas de doute, le défend en tant que source de nourriture, est nettement mieux protégé des autres meutes et des autres animaux, comme les ours par exemple. Les chiots élevés par les humains pourraient avoir été les premiers véritables loups "domestiques" et avoir considéré le groupe comme leur meute.

Quelle que soit la manière dont cette rencontre s'est déroulée, elle a finalement conduit à la domestication du loup et à l'apparition du chien, le meilleur ami de l'homme. Au cours de leur longue cohabitation avec nous, les chiens ont changé et se sont de plus en plus éloignés de leur animal d'origine, le loup. Les changements évolutifs très intéressants du loup au chien ont fait l'objet d'un article spécifique. Ces changements vont de la forme et de la couleur au développement de la musculature faciale pour faciliter la communication avec nous, les humains.

Qu'est-ce qui différencie la digestion du loup et du chien ?

Les loups ne sont pas de purs carnivores, ils font plus précisément partie des carni-omnivores. Ils sont conçus pour manger leur proie dans son intégralité, ce qui inclut non seulement la viande musculaire, mais aussi le contenu de l'estomac de la proie. Comme ces dernières sont dans la grande majorité des cas herbivores, les loups peuvent également digérer dans une certaine mesure des aliments végétaux et même, avec modération, de l'amidon.

Tout comme le loup, le chien n'est pas un pur carnivore, il peut même digérer les aliments végétaux bien mieux que le loup. C'est surtout dans la décomposition de l'amidon des céréales que le chien a un avantage : grâce à une activité amylasique accrue, il possède une tolérance nettement plus élevée dans la digestion des glucides.

De l'amidon et de l'amylase

Les céréales comme le blé, le seigle, le riz et les pommes de terre sont extrêmement riches en amidon. L'amidon fait partie des hydrates de carbone et est une macromolécule polysaccharidique. Il est plein d'énergie utilisable, à condition de posséder l'enzyme amylase et de pouvoir ainsi le décomposer. L'alpha-amylase présente dans le tube digestif peut décomposer les polysaccharides d'amidon en maltose, maltodextrose et divers oligosaccharides, les rendant ainsi utilisables par l'organisme. Nous, les humains, possédons cinq isoformes d'alpha-amylase, présentes dans la salive et les sécrétions pancréatiques. L'activité enzymatique de la salive nous permet donc de décomposer l'amidon dès la mastication. Le pain a donc un goût sucré si on le mâche longtemps, car à un moment donné, on peut goûter les sucres décomposés. Les chiens aussi possèdent de l'amylase, et bien plus que le loup. On ne la trouve pas dans la salive, mais en quantité non négligeable dans les sécrétions pancréatiques - le tube digestif du chien est donc capable de décomposer et d'utiliser certaines quantités d'amidon provenant de céréales ou d'autres produits similaires.

Sélection de la capacité à digérer l'amidon

La capacité à digérer l'amidon est liée au nombre de copies du gène AMY1 codant pour l'amylase salivaire. Plus un individu possède de copies, plus il est capable de décomposer et d'assimiler l'amidon. L'homme n'a pas toujours été capable de digérer l'amidon dans les mêmes proportions qu'aujourd'hui.

Au néolithique, le mode de vie de l'humanité est passé d'une société de chasseurs-cueilleurs à une société sédentaire pratiquant l'agriculture et l'élevage. Ce changement ne s'est pas produit partout dans le monde au même moment, mais a commencé dans le croissant fertile du Proche-Orient vers 10.000 avant J.-C., d'où il s'est étendu au reste du monde pendant des millénaires. Plus on consommait de céréales, de tubercules et de produits dérivés, plus le système digestif de l'homme s'adaptait à cette source de nourriture riche en céréales. Ceux qui possédaient par hasard plus de copies de gènes pour la digestion de l'amidon avaient plus de chances d'être bien nourris et d'engendrer plus de descendants. Cela peut encore être observé aujourd'hui, car les hommes ne possèdent pas partout dans le monde le même nombre de copies du gène AMY1. Ainsi, on en trouve nettement moins chez les peuples originaires de la Yakoutie russe, qui se nourrissent principalement de viande et de poisson, que chez les Européens centraux dont l'alimentation de base est constituée de céréales.

Nous, les humains, ne sommes pas les seuls à posséder de nombreuses copies de gènes permettant de décomposer l'amidon, nos chiens domestiques en possèdent également. Chez eux, c'est le gène AMY2B qui en est responsable. Dans une étude[1] comparant le matériel génétique des loups, des premiers chiens domestiqués et des chiens actuels, il a été démontré que les loups possèdent en moyenne nettement moins de copies de gènes que les chiens domestiques actuels et anciens. Cela suggère que les chiens ont développé, avec les humains, la capacité de décomposer l'amidon et de l'utiliser comme nourriture. Là encore, il y a probablement eu un net avantage sélectif pour les individus qui pouvaient manger non seulement la viande, mais aussi les déchets céréaliers et tuberculeux des habitations. Tout comme chez les humains, toutes les races de chiens connues aujourd'hui n'ont pas le même nombre de copies du gène AMY2B. Ainsi, les races de chiens des régions arctiques, comme le husky sibérien, n'ont que très peu de copies. Comme cette région est dépourvue d'agriculture, cela soutient l'hypothèse selon laquelle la capacité des chiens à digérer l'amidon s'est développée en lien avec le début de l'agriculture humaine.

Au sein de la population canine, le nombre de copies de Amy2B varie. Il n'est donc pas possible de définir une "valeur limite" claire pour la digestion de l'amidon et des recherches supplémentaires sont nécessaires pour déterminer la pertinence du nombre exact de copies.

Les céréales font-elles partie de l'alimentation des chiens ?

Les chiens sont génétiquement conçus pour digérer l'amidon, probablement parce qu'ils vivent depuis des milliers d'années avec des hommes qui cultivent la terre. Les chiens peuvent donc digérer les céréales et utiliser l'amidon qu'elles contiennent comme source d'énergie utile. Un argument souvent avancé contre les céréales dans l'alimentation est le risque d'allergies. Les chiens peuvent développer des allergies massives aux céréales, le plus souvent aux protéines qu'elles contiennent. En réalité, les protéines de céréales ne sont pas plus allergènes que d'autres protéines - la probabilité d'une allergie est similaire à celle d'une allergie à différentes protéines animales.

Pourquoi les aliments pour chiens ne contiennent-ils pas de céréales ?

Les chiens allergiques aux composants des céréales, comme les protéines de blé, ne devraient pas recevoir d'aliments à base de céréales, tout comme les chiens allergiques aux protéines de bœuf. Les céréales sont alors à éviter absolument. Les céréales sont également déconseillées en raison de leur teneur élevée en énergie. Cela peut poser un problème, surtout pour les chiens obèses ou ayant tendance à l'embonpoint, car les aliments contenant des céréales peuvent facilement dépasser les besoins énergétiques en cas d'activité sportive trop faible.

Quels sont les arguments en faveur de la présence de céréales dans l'alimentation ?

Les chiens sont capables de décomposer et d'utiliser l'amidon - que celui-ci provienne de tubercules comme la pomme de terre et la patate douce ou de céréales n'est pas déterminant pour le processus de digestion en soi. Les céréales constituent donc une source d'énergie utile, bien entendu uniquement pour les chiens qui les tolèrent. Comme elles sont peu coûteuses, les céréales permettent de produire des aliments pour chiens à haute valeur énergétique pour les petits budgets. En outre, elle réduit la part de viande dans l'alimentation et donc l'empreinte écologique de l'animal à quatre pattes.

Pour conclure, on peut dire qu'il existe d'innombrables opinions sur la "bonne" alimentation pour chiens - tous ceux qui fournissent à leur chien tous les nutriments nécessaires à une vie de chien saine ont raison. Cela peut être le cas avec ou sans céréales et un calcul correct des rations et des besoins est utile pour chaque chien.

Céréales dans la nourriture pour chiens - sain ou pas ?

29 septembre 2022 — de F.D.